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(mai 2004)

Parité professionnelle
Peut mieux faire

La parité professionnelle est aujourd'hui au cœur des débats qui agitent les ressources humaines. La prise de conscience est là, mais beaucoup reste à faire.
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Nicole Ameline (ministre de la Parité)
La parité, une idée qui fait son chemin
Ann-Charlotte Pasquier (Aubade)
A chaque entreprise sa stratégie
Parité : ce que dit la loi
10 femmes parlent de leur carrière

"L'homme est égaux" disait Coluche. Mais ce sera plus dur pour les "noirs, petits et moches". Dans l'entreprise, certains salariés sont aussi plus égaux que d'autres. D'après une enquête de l'Insee, seulement 17 % des dirigeants en France sont aujourd'hui des femmes, alors que ces dernières représentent 45 % de la population active. Peu nombreuses, les dirigeantes sont également moins bien payées que leurs homologues masculins. En moyenne, elles touchent un salaire de 33 % inférieur à celui des hommes. Et ce constat est valable pour tous les niveaux hiérarchiques de l'entreprise, de l'employé au cadre supérieur.

On l'a compris, malgré des années de débats et de sensibilisation, la parité hommes-femmes dans l'univers professionnel est un chantier loin d'être bouclé. Et pourtant, l'arsenal juridique en faveur de l'égalité entre les deux sexes (lire à ce sujet la tribune de Me Marie Sylvie Vatier) existe bel et bien. Mais c'est bien souvent dans la vie quotidienne des entreprises, au moment où se décident les recrutements, les augmentations ou les promotions, que le poids du passé annihile une partie des espoirs féminins.

"Les obstacles les plus difficiles à lever sont des obstacles invisibles, de nature psychologique, explique ainsi Nicole Ameline, ministre de la Parité et de l'Egalité professionnelle (lire l'interview). Une femme aura plus tendance qu'un homme à croire qu'elle n'est pas capable de relever tel ou tel défi, à renoncer à tel ou tel poste tout simplement parce que ce poste est supposé demander davantage de présence physique dans l'entreprise."

C'est un fait : les femmes ont tendance à s'auto-censurer face aux opportunités professionnelles. Entre la maternité et le temps consacré à la famille, une majorité de femmes admet, résiliée, qu'elle souffre d'handicaps pour s'imposer en entreprise. Selon une enquête du Centre d'études et de recherches sur la gestion des organisations et des relations sociales, seules 7 % des femmes ont demandé une promotion en 2003, contre 15 % des hommes. Mais cette auto-censure n'explique pas tout. La justification serait trop facile.

Un plancher et des parois de verre"

La perception qu'on les hommes de la parité s'avère être l'autre grand obstacle du chantier. Des hommes qui ne sont pas toujours en prise avec cette problématique. D'après l'enquête en ligne réalisée par Le Journal du Management auprès de 503 lecteurs, 27 % des hommes estiment par exemple que la parité est respectée dans leur entreprise. Or, dans ce domaine, seules 14 % des femmes partagent cette analyse. Autre exemple : 17 % des lectrices indiquent qu'aucune femme n'a accès à un poste à responsabilités dans leur entreprise. Seuls 3,8 % des lecteurs ont le même point de vue. Le clivage hommes-femmes est une réalité.

Dans cet environnement, la carrière des femmes ressemble à un parcours du combattant dans un palais des glaces. Une grande partie des femmes se retrouvent peu à peu paralysées dans leur carrière, coincées entre un "plafond de verre" et des "parois de verre". Ces expressions imagées identifient, de manière physique, les obstacles professionnels que doivent affronter les femmes.

Extrait de L'etude Orse n°5, février 2004
(Observatoire sur la responsabilité sociétale des entreprises )

Le "plafond de verre" désigne la barrière empêchant les femmes d'atteindre les niveaux hiérarchiques les plus élevés dans les entreprises. Les "parois de verres" traduisent une autre mécanique, plus sournoise : quand les femmes parviennent à atteindre des postes de haut niveau, elles se retrouvent souvent dans des filières ou des services considérés comme moins centraux, moins stratégiques pour l'organisation (RH, administration, etc.). Elles ne peuvent donc emprunter l'allée centrale, la seule donnant accès aux plus hauts niveaux hiérarchiques.

La nouvelle génération véhicule des valeurs davantage égalitaires"

Ces différents phénomènes sont bien connus par les femmes qui ont atteint des postes d'encadrement. Les dix témoignages que nous avons recueillis le prouvent : chacune de ces femmes, qu'elle soit PDG de CanalSatellite comme Isabelle Parize (lire le témoignage) ou créatrice d'entreprise comme Pascaline Matusiak (lire le témoignage), a dû à un moment ou à un autre de sa carrière faire des choix, parfois des sacrifices, pour concilier vie professionnelle et vie personnelle.

Malgré ce constat quelque peu sombre, il serait faux de dire que les choses n'ont pas évolué sur le front de la parité au cours des dernières décennies. La nouvelle génération de salariés, habituée à une autre forme de relation homme-femme, véhicule au travail des valeurs davantage égalitaires. Ce que confirme Ann-Charlotte Pasquier, PDG de la marque de lingerie Aubade (lire l'interview) : "Aujourd'hui, les femmes qui ont un niveau de responsabilité élevé sont vraiment reconnues. Il y a une quinzaine d'années, ce n'était pas évident : les femmes PDG manquaient de crédibilité. La tendance s'est inversée depuis."

Nicole Ameline (ministre de la Parité)
La parité, une idée qui fait son chemin
Ann-Charlotte Pasquier (Aubade)
A chaque entreprise sa stratégie
Parité : ce que dit la loi
10 femmes parlent de leur carrière

Les entreprises françaises elles-mêmes évoluent, tant pour élargir leur vivier de talents que pour se prémunir des conséquences à venir du papy-boom. Chez IBM, France Télécom, Schlumberger ou PPR (lire l'article), les programmes de diversité se multiplient. Mais en France, contrairement aux Etats-Unis, ces programmes sont lancés avec des pincettes. Pas question de parler de quotas réservés aux femmes. "En Europe, il faut s'attaquer au problème de manière diplomate, considère Ashley Clark, directeur du développement des ressources humaines chez PPR. Dans le groupe, nous ne conduisons pas de politique définie, mais nous suivons de très près certains indicateurs." La prise de conscience est là. Reste désormais les actes.


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