21/09/2005
R&D : les entreprises qui cherchent
le plus La
R&D privée à la traîne
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Peu nombreux sont les grandes
groupes qui dépensent plus de 1 % de leur chiffre d'affaires à la R&D. Un constat
qui s'explique par le poids de la recherche publique en France.
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De
l'ébauche d'une idée au premier prototype puis à la commercialisation
du produit fini, quelques semaines à plusieurs années peuvent s'écouler.
Durant ce laps de temps, c'est aux laboratoires de recherche et développement
(R&D) de se poser les bonnes questions et d'y trouver des solutions. Un challenge
que l'on ne peut relever sans financement ni appui. Lors du salon du Bourget le
18 juin dernier, Dominique de Villepin a justement annoncé des mesures
en faveur de la recherche. L'agence pour l'innovation industrielle (AII), qui
doit être le moteur de la mise en oeuvre de grands programmes d'innovation,
a ainsi vu son budget passer de 500 millions à 1 milliard d'euros. De même,
l'Agence Nationale de la Recherche, créée le 7 février 2005 pour financer les
projets de recherche, s'est vue créditée de 350 millions d'euros
et son budget devrait augmenter de 70 % en 2006. A cela il faut
rajouter la création des pôles de compétitivité (67,
dont six de niveau mondial) dont l'objectif est de développer des projets
de recherche à travers des partenariats entre les différents acteurs
de la société civile, tout en obtenant une visibilité internationale.
Sans oublier le gain, de haute lutte, de l'implantation en France du réacteur
de recherche sur la fusion nucléaire ITER, qui promet de garantir l'attractivité
du territoire. Le budget français consacré à la
recherche scientifique, soit toutes les Dépenses Intérieures consacrées
à la R&D (DIRD) en France pendant l'année 2004, atteint 2,23 % du PIB. Un
chiffre qui situe l'Hexagone dans la bonne moyenne mondiale et le place au-dessus
de la moyenne de l'UE (1,99 %). Pour autant,
l'objectif des 3% du PIB investis en R&D d'ici 2010, fixé lors du Conseil
Européen de Lisbonne en mars 2000, apparaît comme un défi
très ambitieux. D'autant plus ambitieux que la Commission européenne
plaçait au début de l'année la France parmi les pays "qui
perdent du terrain" en R&D. Car l'ensemble
de ces signes positifs ne doivent pas cacher la faiblesse de l'effort des entreprises
françaises en recherche et développement. La part des dépenses
consenties dans ce domaine par les entreprises sur le total des investissements
R&D en France est de 52 % (soit 1,36 % du PIB) en 2004. Ce taux est relativement
faible, comparé au poids des firmes allemandes (60 % du total des investissements
R&D), à celles des sociétés américaines (68 %) et aux 72 % du
secteur privé nippon.
Répartition
des investissements R&D entre le privé et le public (2004,
source : DG Recherche - Eurostat) |
Pays |
Investissements
R&D | | entreprises | | Etat |
| France |
| | Allemagne |
| | Etats-Unis |
| | Japon |
| | Cette part du privé inférieure reste une des
principales lacunes du système français. La prépondérance
de la recherche publique se traduit notamment par de grosses difficultés
pour passer de l'idée au produit. D'où la création de foyers
d'innovation communs pour développer les partenariats entre instituts de
recherche publique et entreprises. Selon un article publié dans
le Financial Times en juin 2005, plus de la moitié des dépenses
R&D du secteur privé françaises serait assurée par treize
entreprises seulement. Cette concentration de l'effort R&D concerne avant
tout les grands comptes et qui peut s'observer parmi les entreprises du Cac 40
(voir notre tableau comparatif). Ainsi, Thalès
obtient la palme au regard du ratio budget R&D par rapport au chiffre d'affaires
qui atteint les 18 %. En 2004, le groupe d'électronique de défense a investi
1,9 milliard d'euros. Mais, même au niveau du Cac 40, tous les
grands comptes ne traitent pas la R&D avec la même détermination.
Les efforts de R&D se concentrent sur certains secteurs : l'automobile, la
téléphonie, la pharmacie ou encore l'aéronautique. Concernant l'automobile, Renault
(sans Nissan) consacre 5,1 % de son chiffre d'affaires à la R&D quand
PSA est à 4 %. Sanofi, consacré numéro deux mondial de l'industrie
pharmaceutique, a de loin le plus important budget R&D de France, avec près
de quatre milliards d'euros investis en 2004, soit 16 % de son chiffre d'affaires.
En aéronautique et armement, EADS investit 2,13 milliards (7.7 %).
Côté téléphonie, France Télécom affiche
un ratio R&D/chiffres d'affaires de 1,6 % (environ 600 millions d'euros) quand,
en Allemagne, Deutsche Telekom y consacre 900 millions d'euros, soit 1,6 %
de son chiffre d'affaires 2004. Dans les autres domaines de l'industrie,
les groupes ne consacrent jamais plus de 5 % à leur R&D (Michelin
4 %, Air Liquide 1,6 %, Saint-Gobain 1,1 %). Dans la construction,
le budget R&D représente rarement plus de 1 % du chiffre d'affaires
(Lafarge 0,7 %, Suez 0,2 %, Vinci 0,1 %). Enfin, Total, qui a réalisé
avec 122,7 milliards d'euros le plus gros chiffre d'affaires d'une entreprise
française cotée au Cac 40 en 2004, ne consacre que 0.5 % de
ce chiffre à sa R&D. Côté
implantation des centres de recherche, si l'américain Motorola a annoncé
le 9 septembre qu'il allait reprendre un site R&D à Rennes, de nombreux
exemples récents de création de pôles R&D en Chine (Saint-Gobain,
Alcatel, Intel, Ericsson, Solvay...) viennent contester l'attractivité
du territoire européen, a fortiori français. Si la Chine
tend de plus en plus à être considérée comme une "terre
de R&D", on ne peut cependant pas aller jusqu'à parler de délocalisation
de la R&D comme cela se passe pour la production. Les grands groupes
visent avant tout à regrouper des équipes de chercheurs qualifiés
avant d'être concernés par leur coût, même si ceux-ci
orientent leurs projets en fonction des contraintes produits. Les créations
de nouveaux pôles en Chine sont bien souvent de nouvelles implantations
visant à s'adapter à un marché en expansion et préparer
leur R&D à de nouvelles pratiques. La R&D, depuis longtemps internationalisée
et orientée par les consommateurs, se tourne naturellement vers les marchés
qui permettent la créativité.
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