Journal du Net > Management >  Inde, la plaque tournante - Cyril Rayer (Towers Perrin)
INTERVIEW
 
février 2005

Cyril Rayer (Towers Perrin)
Le rapport au travail est ici totalement différent

Ce consultant en ressources humaines a pris une année sabbatique pour photographier le travail en Asie. Un voyage initiatique.
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Cyril Rayer est consultant en ressources humaines chez Towers Perrin. Pendant une année, il a parcouru le Sud-Est et le centre de l'Asie ainsi que l'Inde. Photographe passionné, il a ramené près de 18.000 photos de ce voyage, le tout entièrement consacré à la thématique du travail. Témoignage d'un voyageur pas comme les autres.

D'où vous est venue l'idée de photographier le travail en Asie ?
Cyril Rayer J'avais envie de voyager et de faire de la photo, une passion qui ne m'a jamais quittée parallèlement à mes fonctions en ressources humaines. Mais il me fallait trouver un thème pour axer ce voyage, et je me suis naturellement tourné vers celui du travail. Dans plusieurs situations déjà, en France ou en Roumanie où je travaillais, j'ai souvent regretté de ne pas avoir d'appareil-photo sur moi. En Asie, j'ai pris le parti de ne pas photographier la misère. Dans mes photos je raconte l'Asie comme d'autres le feraient au travers de la cuisine, du patrimoine ou de la culture. C'est une autre facette.

Quelle a été votre démarche pour sélectionner les lieux et y entrer ?
Tout s'est passé directement sur place, notamment en Inde. Pour trouver les bon contacts il a fallu beaucoup de temps, une personne m'envoyant vers une autre, puis une autre... Mais cela a été l'occasion de découvrir des lieux sans a priori. J'ai également envoyé des demandes par Internet pour savoir si quelqu'un pouvait m'ouvrir tel ou tel lieu, ou bien si certains avaient des contacts. Le fait est qu'en Asie du Sud tout le monde connaît quelqu'un. Il y a tellement d'expatriés.

Comment se sont déroulées vos prises de vue sur place ?
En Asie, il fallait rester longtemps sur les lieux de travail pour en extraire la réalité du quotidien. Il fallait le temps de s'imprégner du lieu. Les visites se sont ainsi espacées sur six ou sept jours en moyenne pour chaque lieu, mais de manière discontinue. J'ai photographié des lieux de travail qui me semblaient représentatifs du pays, pour l'ambiance ou l'industrie. Par exemple, en Malaisie, je suis allé dans une plantation de thé, et en Thaïlande dans un stade de boxe. Parfois il a fallu tourner autour du lieu longtemps avant de capter quelque chose de fort. Dans le cas d'une ONG de Phnom Pen, finalement c'est le processus que j'ai photographié : les enfants qui vivent d'une décharge sont pris en charge et placés, puis suivis de manière très professionnelle.


Je n'ai pas vu les clichés que je m'attendais à voir"

Qu'est-ce qui vous a surpris le plus durant ce voyage ?
J'ai eu un choc en visitant le call center de Delhi : je n'étais plus en Inde, mais en Californie. Dès qu'on en sort, simplement pour aller chercher des cigarettes, on réatterrit sur le sol indien. Toujours en Inde, dans une usine de crevettes, je n'ai rien senti, c'était aseptisé. Et ça, je l'ai photographié. L'Inde est un pays très sale et pourtant cette usine de crevettes ressemblait davantage à un hôpital qu'à un site industriel.

Comment définiriez-vous le rapport au travail en Inde par rapport à la France ?
Le rapport au travail est totalement différent. En France, on observe la prédominance du rapport performance-cash. En Inde, le travail est bien sûr alimentaire, mais aussi il apporte parfois la célébrité, la satisfaction spirituelle ou celle d'aider les autres. En revanche, les métiers sont répartis suivant les castes.

Le Site de Cyril Rayer
  Best place to work

Qu'en est-il de la position de la femme au travail en Asie ?
J'ai eu quelques surprises contraires aux idées reçues, comme par exemple dans une usine de soie en Ouzbékistan, dans une région traditionaliste. A l'intérieur de l'usine les comportements étaient différents entre hommes et femmes. Celles-ci jouent, dansent, sourient, et discutent librement alors qu'à l'extérieur un homme seul n'approche souvent pas à moins de dix mètres d'une femme célibataire. Dans l'usine, les hommes font même la cuisine un jour sur deux.


Le syndrome indien"

Que vous apporte ce voyage dans votre métier ?
Je suis fasciné par le rapport de l'homme au travail, comment il le perçoit, comment il l'organise. Le projet en Asie m'a permis de rencontrer des rapports au travail différents de ceux que nous connaissons habituellement chez nous. Il y a beaucoup d'idées à piocher, et d'exemples à prendre. La motivation au travail n'est pas seulement une affaire de cash ou de carrière.

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Au final, quel bilan faites-vous de cette expérience ?
D'une part le rapport au travail est totalement différent en Asie, et d'autre part je crois n'avoir pas vu les clichés que je m'attendais à voir. Une bonne surprise finalement. Les gens aiment travailler. Et le voyage lui-même en Inde est impressionnant. Lorsque vous parcourez 300 kilomètres, vous changez de pays. Les cultures, les langues et les religions sont multiples. Là-bas, on se sent véritablement perdu. C'est ce qu'on appelle couramment le syndrome indien, très courant chez les expatriés.

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Parcours

HEC promotion 1992, Cyril Rayer a également obtenu une licence d'ethnologie et un DEA d'anthropologie sociale à l'EHESC. Après un séjour en Russie et un début de doctorat, il entre chez Coopers et Lybrand en 1995 pour travailler dans les ressources humaines et la gestion du changement. Depuis 2000, il est consultant en ressources humaines chez Towers Perrin.


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