28/06/2006
Qui sont les champions... du scooter
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Si Piaggio est toujours leader, la concurrence, Honda et Yamaha en tête, a mis un coup d'accélérateur. Et pour cause, la croissance du marché en France est à deux chiffres. |
Les ventes de scooters 125 centimètres-cubes (cc) ont atteint 54.672 unités en 2005, soit une croissance de 13,2 % par rapport à 2004. Elles représentent plus du quart du nombre total de deux-roues de plus de 50 cc écoulés en France cette année. Et la croissance ne faiblit pas : sur les cinq premiers mois de l'année 2006, le marché du scooter 125 cc a enregistré une hausse phénoménale de plus de 40 % par rapport à la même période l'année précédente, grâce à une heureuse conjonction entre la sortie de nouveaux modèles et une vague d'offres promotionnelles.
Le constructeur italien Piaggio est le leader historique de ce marché, mais il doit désormais affronter une rude concurrence de la part de plusieurs spécialistes japonais de la moto comme Yamaha, Honda et Suzuki. Peugeot, désormais solidement implanté sur ce créneau, est le seul fabricant français à leur donner la réplique, tandis que de nouveaux acteurs chinois et coréens se font une place chez les concessionnaires.
L'avènement du scooter 125
Depuis 1995, la législation permet aux détenteurs d'un permis B de conduire un deux-roues motorisé de moins de 125 cc. L'accès à ce type de scooter, dont la cylindrée du moteur est en réalité légèrement inférieure à 125 centimètres-cubes, est donc aujourd'hui largement démocratisé. Les problèmes croissants de circulation dans les grandes villes et la saturation des réseaux de transport en commun ont attiré un public nouveau de travailleurs urbains vers ces moyens de locomotion qui étaient jusque-là l'apanage des adolescents et surtout conçus avec des moteurs 50 cc. Depuis 10 ans, les ventes de ces derniers ont stagné et pourraient bientôt plonger selon les acteurs du secteur. Sur la même période, les ventes de scooters 125 cc ont, quant à elles, doublé.
Immatriculations des scooters de cylindrée comprise entre 50 et 125 cc
(source : Chambre Syndicale Nationale du Motocycle )
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Année
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Nombre d'immatriculation
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Taux de croissance
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2000
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28.657
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+22,1 %
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2001
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32.388
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+13,2 %
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2002
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31.733
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-2,0 %
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2003
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41.012
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+29,2 %
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2004
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48.294
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+17,7 %
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2005
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54.672
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+13,2 %
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Le client-type de ces scooters est un homme, cadre, entre 30 et 50 ans, qui veut écourter son temps de trajet et ne pas être tributaire des grèves. Mais la clientèle potentielle est très large : "Avec une offre qui se développe et de nouveaux modèles, nous arrivons à toucher un public de femmes ou des conducteurs plus âgés", rappelle Grégory Lejosne, directeur des ventes chez Yamaha Motor France.
Piaggio, un leader historique
Avec 35 % de part de marché en 2005, l'Italien caracole en tête sur le marché français, avec ses marques Piaggio, Vespa et Gilera. Du scooter, il se dit à la fois l'inventeur - le Vespa s'est vendu à plus de 16 millions d'exemplaires dans le monde - et le spécialiste, puisque, contrairement à ses concurrents, l'enseigne se consacre exclusivement à ce type de véhicule.
Parts de marché des scooters 125 en 2005
(Source : constructeurs)
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Il bénéficie en outre de son expertise de leader sur le marché italien, le plus important du monde, avec près de 350.000 unités vendues par an. Le groupe a une approche automobilistique, en proposant des deux-roues confortables et rassurants sur des créneaux haut de gamme à l'exemple du X8, aujourd'hui en tête des ventes. Mais il mise aussi sur le design, avec sa marque Vespa, spécialiste des scooters néo-retro, qui fête
cette année ses 60 ans et dont le modèle PX, vieux de trente ans, est toujours au catalogue.
En l'absence de nouveautés à présenter début 2006, Piaggio n'a toutefois pas profité du boom des ventes et a vu sa part de marché tomber à 26 % sur les cinq premiers mois de l'année. Le constructeur compte sur la sortie de nouveaux modèles en septembre pour remonter la pente.
Des concurrents venus de la moto et de l'automobile
Les concurrents se sont appuyés sur leur histoire et leurs spécificités pour conquérir le marché et ne considèrent pas vraiment Piaggio comme un prescripteur de tendances. Le japonais Yamaha, numéro deux du marché, bénéficie de sa notoriété pour conquérir le public avec des véhicules proches de l'univers de la moto et de l'imaginaire sportif, tel que le X-Max, dernier né de la gamme du nippon et concurrent direct des X8 et X9 de Piaggio. C'est également sur ce créneau que se positionnent Honda, Suzuki, plus connus en France pour leur production moto qu'automobile. Stratégie différente pour Peugeot, dont les véhicules plus volumineux et bien équipés, viennent rappeler l'expérience de la conduite automobile.
Parts de marché des scooters 125 - janvier à mai 2006
(source : constructeurs)
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Plusieurs compétiteurs asiatiques ont fait une percée, encore modeste mais significative sur le marché. Le coréen Daelim, dont le S2 125 pointe en quinzième place, et surtout le taïwanais Kimco, avec son Grand Dink, dixième meilleure vente. Des fabricants chinois plus confidentiels comme Sym ou Jinsheng proposent aussi des modèles à prix très compétitifs.
L'importance des réseaux
La compétition se joue également sur la taille des réseaux de concessionnaires, revendeurs et réparateurs, alors que les ventes de scooters 125 cc, longtemps cantonnées à l'Ile-de-France et à la région PACA, se développent désormais fortement dans les villes de province.
Yamaha privilégie les concessionnaires mono-marque, 75% de ses quelque 300 concessions, et s'appuie sur son réseau de revendeurs moto existant. Même approche pour Peugeot et MBK. Ils bénéficient tous deux d'un réseau capillaire de respectivement 750 et 550 concessions, hérités de leurs revendeurs de vélos et de petites cylindrés, généralement bien implantés en centre-ville. MBK, dont près de 60% des revendeurs sont mono-marques, tend toutefois à développer les partenariats avec des concessionnaires multimarques pour accroître la visibilité de ses produits.
La clientèle est très sensible à la marque et la qualité du réseau"
Philippe Beziere, MBK |
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Parce qu'il ne vend que des scooters, Piaggio n'a pas l'avantage d'avoir un réseau préexistant, hors Ile-de-France et PACA. Sur ses 370 concessionnaires, 70 % sont multimarques et la tendance est encore à la hausse. Mais, comme le rappelle Jean-Philippe Dauviau, directeur marketing de Piaggio France, "la quantité ne fait pas le volume, et l'essentiel de nos ventes est réalisé par un nombre réduit de concessionnaires exclusifs dans les grandes villes".
Un marché "haut de gamme" sur fond de guerre des prix
Des premiers prix, inférieures à 2.500 euros, aux modèles les plus élaborés, jusqu'à 4.500 euros, la croissance des ventes est homogène sur l'ensemble des gammes de prix.
Ce sont toutefois les scooters moyen et haut de gamme qui totalisent les plus fortes ventes puisque les huit scooters les plus vendus en France coûtent plus de 3.500 euros. "C'est une clientèle automobile, peu spécialisée, qui veut être rassurée vis-à-vis d'un produit qu'elle connaît mal et achète souvent pour la première fois. Elle est donc très sensible à la marque et la qualité du réseau" explique Philippe Bézière, directeur général délégué de MBK France.
Pour Jean-Philippe Dauviau, "le scooter vient souvent en remplacement d'une voiture, les clients sont donc prêts à mettre le prix et peu sont tentés par les produits très bon marché. Or, pour proposer des produits de qualité et surtout pour maintenir un réseau et garantir à nos partenaires leurs revenus, il est impossible de descendre en-dessous d'un certain seuil de marge ". En effet, le succès des produits haut de gamme n'autorise pas pour autant des marges confortables compte tenu de la guerre des prix que se livrent les différents acteurs du marché.
Ventes de scooter 125cc de janvier à mai 2006 en France
(source : constructeurs)
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Marques
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Modèles
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Volumes
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Prix maximum recommandé (en euros)
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Piaggio
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X8
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2.649
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3.690
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Yamaha
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Xmax
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2.571
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3.990
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Suzuki
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An125(Burgman)
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1.931
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3.449
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Yamaha
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2003
Majesty
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1.793
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2.990
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Peugeot
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Satelis
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1.596
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3.799
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Piaggo
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X9
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1.520
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4.399
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Honda
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Pantheon
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1.510
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3.700
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MBK
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Skycruiser
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1.202
|
3.990
|
Vespa
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LX
|
725
|
3.090
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Kymco
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Grand Dink
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724
|
2.795
|
Vespa
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Gran Turismo
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718
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3.670
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Aprilia
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Atlantic 125
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688
|
3.649
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L'exigence de qualité explique donc l'emprise très forte des grandes marques sur le marché et la relative faiblesse des "discounters" venus d'Extrême-Orient. Mais les principaux constructeurs ne négligent toutefois pas la demande croissante pour des produits économiques, autour des 2.000 euros, un créneau sur lequel les concurrents asiatiques sont redoutables. Piaggio a par exemple noué un partenariat avec une usine chinoise pour la production de scooters économiques de 100 cc.
Vers une sophistication des produits
"Si le scooter s'utilise surtout en milieu urbain, il sert de plus en plus pour des trajets de banlieue à centre-ville, et même pour partir en week-end. Son usage se rapproche de celui d'une automobile " explique Fréderic Bart, responsable relations publiques chez Peugeot Motocycle.
Toutes les innovations-produit en cours confirment la tendance à une sophistication croissante des véhicules qui doivent répondre aux attentes en termes de sécurité, de confort et de commodité : vastes espaces de rangement sur le X-Max de Yamaha, ABS de série sur le Satelis de Peugeot, deux roues-avant pour le MP3 de Piaggio
Mais les constructeurs vont devoir trouver un juste équilibre entre l'innovation et sa valorisation sur un marché où la pression concurrentielle sur les prix est forte.
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