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11/01/2006
Gameloft, l'art de la gagne
Avec onze trimestres consécutifs de croissance à trois chiffres, Gameloft, développeur et éditeur de jeux vidéo sur mobiles, n'a pas à rougir face à son illustre actionnaire, Ubisoft. Le chiffre d'affaires consolidé de cette ex-start-up qui compte désormais des filiales dans onze pays, devrait atteindre les 44 millions d'euros en 2005 pour une croissance annuelle de l'ordre de 90 %. Leader européen sur le marché des jeux mobiles, Gameloft se classe numéro deux sur la scène internationale, avec 1 million de jeux vendus en moyenne par mois. Et l'aventure ne fait que commencer. Un positionnement très tôt sur un marché en plein essor Le marché du jeu sur mobile n'en est en effet encore qu'à ses balbutiements. Pour pouvoir utiliser ces jeux évolués, le consommateur doit posséder un téléphone sur lequel le constructeur a installé des technologies de type Java ou Brew. Or, seulement 40 à 45 % des terminaux actuellement en circulation en sont équipés. Les spécialistes estiment toutefois que ce taux devrait atteindre les 95 % dès 2008, à mesure que le parc de téléphones portables se renouvellera. Avec un potentiel de 500 millions de joueurs sur mobiles, Gameloft est donc positionné sur un marché de masse, bien qu'encore émergeant.
Le principal atout de l'entreprise française est d'avoir été pionnière sur ce secteur. Dès 1999, alors que les téléphones portables se généralisent dans les foyers, l'un des co-fondateurs d'Ubisoft, Michel Guillemot, convaincu qu'il existe un marché potentiellement important pour les jeux sur mobiles, se lance dans l'aventure. Il crée Gameloft et lui donne immédiatement les moyens de réussir. Cela passe par de très lourds investissements, avec notamment la création de six studios de développement de jeux, qui plombent les résultats du groupe pendant trois ans. Près de 40 millions d'euros, apportés par les fondateurs puis par l'augmentation de capital réalisée pour l'entrée en bourse en juin 2000, sont ainsi investis dès le premier exercice. Mais en 2002, quand la technologie Java est introduite sur les portables, Gameloft est prêt. Le développement des jeux en interne : un atout Son point fort face à la concurrence tient au choix stratégique de privilégier la conception en interne des jeux. Gameloft ne sous-traite pas : "cela reviendrait trop cher et l'offre serait rarement compatible avec la grande variété de téléphones", explique-t-on à la direction. Car la complexité de ce marché tient à l'hétérogénéité des mobiles eux-mêmes : les caractéristiques de l'écran, la position des touches, les spécificités du processeur changent entre deux marques, voire entre deux modèles d'une marque. Le travail nécessaire pour adapter un nouveau jeu pour les divers terminaux existants est donc essentiel. Et c'est sans compter la traduction incontournable des règles dans les différentes langues lorsqu'on s'adresse à un public international. Ainsi, chez Gameloft, la plupart des soixante jeux du catalogue sont aujourd'hui déclinés en 700 versions avant d'être commercialisés. Une grande hétérogénéité qui ne devrait pas beaucoup se réduire dans les années à venir, à en juger par la variété des demandes des consommateurs en matière de téléphone.
Cette force de frappe sur le marché mondial séduit les détenteurs de licences : Gameloft a ainsi remporté la déclinaison sur portable des superproductions américaines King Kong et de La Guerre des Mondes. Il s'appuie également sur les licences d'Ubisoft, que le spécialiste des jeux vidéo a mis à sa disposition en échange de 20 % du capital. Cette mise en commun est d'ailleurs l'unique synergie entre les deux entreprises puisque la production de jeux sur mobile se révèle être techniquement très différente de celle sur consoles. Enfin, certains jeux, comme Asphalt : Urban GT ou Block Breaker, sans licence initiale, ont connu un succès tel qu'ils sont devenus de véritables marques. Un circuit de distribution maîtrisé
Le fleuron français du jeu sur mobile dispose donc d'atouts stratégiques non négligeables, soutenus par une situation financière solide : son ratio d'endettement reste bas (les dettes représentent environ 15 % des capitaux propres) et sa cotation en bourse, intervenue dès 2000, a facilité la levée de nouveaux fonds.
Mais les défis sont nombreux. Ils sont tout d'abord technologiques : l'apparition des téléphones 3G ouvre de nouvelles portes de développement, comme le jeu en réseau, et l'offre va devoir s'adapter très rapidement. Commerciaux ensuite : le potentiel du marché ne passe pas inaperçu aux yeux d'entreprises comme Yahoo ou Disney qui commencent à développer leur propre offre. La partie ne fait donc que commencer...
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