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CARRIERE
 
04/01/2006

Pierre Cohen Tanugi (Ness)
L'humain n'est pas une ressource

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Partout, la pression augmente. Il faut "faire plus avec moins", la difficulté à remplir les missions s'accroît, les enjeux deviennent plus lourds.

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Cela "passe" mal. Pourquoi ? L'exigence n'est pourtant pas une invention récente. Mais il y a quatre ou cinq ans encore, l'échange emploi/travail était réglé par une convention tacite : l'employeur demandait et obtenait davantage, le collaborateur recevait en contrepartie rémunération, promotion, statut, perspectives d'avenir etc. Aujourd'hui, travailler beaucoup, sacrifier en partie sa vie privée à sa vie professionnelle, cela peut encore s'envisager, à condition d'y trouver une satisfaction supérieure. Cela peut s'appeler la considération, la reconnaissance, l'épanouissement. De façon plus certaine, cela s'appelle le sens.

Jacques Chirac réclame plus de sens pour les défavorisés, ils ne sont pas seuls à en avoir besoin. Une étude récente (Capgemini Consulting et TNS Sofres) portant sur 4.000 salariés fait ressortir comme "une tendance sociétale lourde" l'aspiration à l'épanouissement de soi, qui supplante l'adhésion à des valeurs transcendantales.

C'est l'époque du mieux : manger mieux, vivre mieux, moins polluer, être acteur de sa vie. Pour que l'homme avance, le matériel ne suffit plus : au-delà du matériel, il faut un but, une vision. La quête de sens supplante désormais les motivations purement matérielles.

Exprimée ou non, elle représente l'un des moteurs essentiels de la conduite du changement :
  Quel sens y a-t-il à travailler toujours davantage, quand le futur est de plus en plus aléatoire ?
  Quel sens y a-t-il à rechercher l'intégration sociale en suivant les règles quand la société accumule les signes de rejet ?
  Quel sens y a-t-il à participer au débat des politiques quand les politiques ne débattent qu'entre eux ?
  Quel sens y a-t-il à s'investir dans l'entreprise quand l'entreprise n'investit pas dans l'humain ?

Pour sortir par le haut, vivre positivement l'expérience travail
La pression reste un instrument de management efficace, apprécié des managers. Mais cela ne doit pas les empêcher de rechercher aussi l'efficacité dans le champ insuffisamment exploité de l'épanouissement dans le travail. Paternalisme et endoctrinement ne font plus recette, mais les sciences comportementales ouvrent un champ nouveau : toute "expérience" humaine peut être vécue de différentes façons et générer des ressentis différents.

Ceci est aussi valable pour l'expérience travail. L'entreprise et le salarié ont un intérêt commun à la rendre positive, le plus possible. Il en résultera plus de productivité et plus de satisfaction, et c'est tout l'équilibre individuel du salarié qui en bénéficiera.

Les collaborateurs d'une entreprise représentent une véritable réalité patrimoniale"

Pour y parvenir, la relation de l'entreprise avec chaque collaborateur doit être abordée comme une relation avec l'individu pris dans son entier, c'est-à-dire avec le salarié en même temps que le père ou la mère de famille, le sportif, le téléspectateur, l'électeur, etc., car il est tout cela à la fois. Toute personne recherche en permanence la meilleure satisfaction de l'ensemble de ses composantes, qui est lui-même en interaction avec les différentes composantes de la société au sens large.

Pour mettre en pratique cette approche globale de la satisfaction, je propose d'abandonner la notion de ressources humaines au profit de celle de capital humain, plus proche de la véritable réalité patrimoniale que représentent les collaborateurs d'une entreprise.

La notion de ressource sous-entend trop souvent une sorte de réservoir reconstituable, voire substituable. A l'inverse, l'humain doit pour l'entreprise être considéré comme un capital. A ce titre, il est de la plus haute importance de le maintenir et de le faire fructifier.

Ceci est d'autant plus urgent que, à l'excès de main d'œuvre, va succéder la pénurie, liée au creux des classes d'âge productives. Il va falloir redécouvrir l'intérêt des savoir-faire acquis, en termes de vécu, de connaissance intime de l'entreprise, et se rendre compte du fait que le savoir des personnes fait partie des actifs de l'entreprise.

Pour préserver cet actif et le faire fructifier, il existe des solutions, simples à appliquer. Elles reposent sur l'implication du management à tous ses niveaux pour prendre en compte le besoin de sens. Quelques exemples, issus de l'expérience :

  Organiser des réunions d'échange et de questions relatives au devenir de l'entreprise
Elles permettent aux collaborateurs de tous niveaux de réaliser comment leurs enjeux individuels, voire privés, peuvent être compatibles avec ceux de l'entreprise, en même temps que de mieux endosser ces derniers. Elles permettent aussi au management intermédiaire de perfectionner son rôle de relais et, une fois levée la peur de la confrontation, de valider sa propre implication.

  Favoriser les zones de prise de responsabilité directe
Même limitées, elles développent l'autonomie et renforcent l'implication, en même temps qu'elles "donnent de l'air" à celui qui délègue comme au délégataire.

  Renouveler les formations à la communication transversale et hiérarchique, pour assurer une circulation plus fluide et pertinente de l'information.

  S'engager dans une démarche de cohésion d'équipe pour que chacun contribue à la dynamique et s'en trouve satisfait.

Ces actions instaurent un lien nouveau, plus mature, plus paritaire, plus en phase avec la façon dont les salariés conçoivent leur rapport à l'entreprise. Plutôt que de nous lamenter sur la perte de l'engagement et du lien "d'avant", réinstallons le lien. Chaque entreprise en a besoin, chaque collaborateur/citoyen le souhaite. Acceptons simplement que ce lien ait évolué.


Parcours

Pierre Cohen Tanugi est diplômé d'HEC, d'études littéraires à la Sorbonne, et a suivi formations au coaching individuel et d'équipe par Mediat-Coaching et Cohésion Internationale. Après quinze ans à des postes de responsabilité en grandes et moyennes entreprises, il a créé son agence de marketing et communication. Il est consultant et coach en France et à l'étranger (excellente maîtrise de l'anglais, de l'espagnol et de l'italien) et praticien PNL.


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