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19/10/2005

Développement durable : la formation ne fait pas tout

Les écoles et universités proposent aujourd'hui une quarantaine de formations. Mais les débouchés restent limités. Seuls les passionnés peuvent espérer trouver leur place dans ce domaine. Témoignages.
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  Guide des formations (Novethic)
"Je fais mon mémoire sur le développement durable et je souhaiterais recevoir des informations sur ce thème." La messagerie du Journal du Management accumule les demandes des étudiants. Depuis quelques années, ils sont séduits par le développement durable. Cet engouement a entraîné une multiplication des formations depuis 2003. Novethic, centre de ressources, d'information et d'expertise sur le développement durable (filiale de la Caisse des dépôts), en recense aujourd'hui une quarantaine. Mais le marché de l'emploi de la responsabilité sociale et environnementale peut-il absorber quelque 600 diplômés par an ?

Sur le créneau du développement durable, les formations sont proposées par plusieurs écoles d'ingénieurs, des écoles de commerce, Sciences-Po et surtout des universités. La plupart des formations sont des troisièmes cycles (master professionnel ou master de recherche et mastère spécialisé). Il est également possible de suivre une formation continue à temps partiel, comme par exemple à Dauphine ("développement durable et organisations"). Ces 3èmes cycles s'adressent à des profils très variées : financiers, ingénieurs, juristes, spécialistes des ressources humaines, économistes, chimistes... Généralement, elles se basent sur l'intervention de nombreux acteurs. Les professeurs sont encore rares dans ce domaine, la recherche ayant débuté depuis seulement quelques années.

Il existe un décalage entre la demande des étudiants et les offres d'emploi"

Anne-Catherine Husson, Novethic

 

Le développement durable est avant tout un état d'esprit, une manière d'aborder les problèmes. Est-ce nécessaire de s'y former ou peut-on apprendre sur le tas ? "C'est une notion simple à comprendre, mais difficile à intégrer dans l'entreprise", explique Anne-Catherine Husson, directrice éditoriale de Novethic. Par exemple, si vous souhaitez l'appliquer aux achats, comment allez-vous gérer les appels d'offres ? Quelle est la réglementation ? Comment sélectionner les acteurs ? Comment éviter les ruptures de stock ? Les formations en développement durable apportent ce type de réponses.

Les grandes réglementations sont étudiées et des cas concrets exposés. "J'ai été embauchée chez Vigeo en partie grâce à mon diplôme et j'utilise dans mon travail des notions assimilées lors du DESS", affirme Adelina Miteva, analyste chez Vigeo, diplômée de Sciences-Po Lyon et d'un troisième cycle à Paris XII "audit social et sociétal" (aujourd'hui appelé "management de la responsabilité sociale des entreprises"). Morgan Carval, juriste spécialisé en droit de l'environnement, estime également que son 3ème cycle à l'ESC La Rochelle en "management de l'environnement" a été déterminant pour rentrer chez Arese (absorbé par Vigeo en 2002). Il est aujourd'hui analyste extra-financier chez BNP Paribas asset management.

Diplômé en 1999, Morgan Carval fait partie des "pionniers" du développement durable. Quelques années ont passé depuis son premier emploi et les besoins en recrutement se sont réduits. Si les étudiants trouvent en général facilement un stage, avec parfois beaucoup de responsabilités, il est ensuite plus difficile d'être embauché en CDI. "Il existe un décalage entre la demande des étudiants et les offres d'emploi", constate Anne-Catherine Husson.

Nous formons des futurs managers qui intégreront le développement durable dans leurs pratiques"

Bénédicte Faivre-Tavignot, HEC

 

Les métiers du développement durable sont pourtant variés : manager développement durable dans un grand groupe, analyste dans une agence de notation, analyste extra-financier, consultant... Mais les places sont convoitées. Les agences de notation embauchent peu. Idem pour les banques. "Dans l'investissement socialement responsable, les débouchés demeurent limités, prévient Morgan Carval. C'est encore un marché de niche."

Au sein des entreprises, les effectifs restent restreints. Chez Arcelor, la cellule développement durable est constituée de seulement deux personnes : Jérôme Granboulan, executive vice-président en charge du développement durable, ancien directeur innovation et R&D, et Jacky Prudhomme, également un ancien d'Arese, diplômé d'un 3ème cycle en économie de l'environnement. "Nous sommes une structure très légère qui travaille avec tous les métiers de l'entreprise, commente ce dernier. Nous confions parfois une mission à un stagiaire, mais nous ne recrutons pas car l'objectif premier reste l'implication et la participation de chacun des salariés et managers du groupe à la démarche développement durable d'Arcelor." De plus, les équipes développement durable sont généralement issues de l'interne. "Il s'agit d'une fonction transversale, poursuit Anne-Catherine Husson. L'efficacité de la mission d'une personne venue de l'extérieur est moindre."

Certaines écoles et universités, conscientes des difficultés du marché de l'emploi, cherchent avant tout à donner une nouvelle dimension à des étudiants dont la formation initiale s'avère solide. "Il ne s'agit pas de former des super spécialistes du développement durable, ce qui impliquerait des débouchés très limités, assure Bénédicte Faivre-Tavignot, directrice pédagogique du mastère HEC. Nous formons de futurs managers qui intégreront le développement durable dans leurs pratiques." Tous les anciens de la première promotion (2003) ont trouvé un emploi, sauf pour des raisons familiales ou de santé.

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Il faut donc tirer profit de solides acquis, voire même d'une première expérience professionnelle. "Pour les fonctions incluant le développement durable, les entreprises recherchent souvent des salariés expérimentés", prévient Anne-Catherine Husson. Le métier le plus porteur est probablement celui d'acheteur.

Les étudiants ou les salariés en reconversion ne doivent pas hésiter à ouvrir leurs horizons et anticiper les besoins, notamment liés à la protection de l'environnement. Quelques anciens du mastère HEC "management du développement durable" ont par exemple été recrutés en financements de projets environnementaux ou encore dans le recyclage des déchets.

Dans la voie du développement durable, les parcours ne sont pas tout tracés. Les diplômés d'un troisième cycle sont unanimes : il faut "bétonner" son projet et apprendre à le vendre. Le réseau tissé lors d'une formation ne peut qu'y contribuer. Mais il faut avant tout être passionné par son sujet.



Un coût très variable selon la formation

  Les masters professionnels et de recherche (équivalents des anciens DESS et DEA) durent deux ans. Comme tout master, son coût correspond aux frais d'inscription à l'université.
  Dans les écoles de commerce ou d'ingénieur, les mastères spécialisés coûtent entre 9.000 et 15.000 euros. Celui d'HEC revient par exemple à 13.600 euros.
  Les formations continues peuvent être financées par différents fonds. A Dauphine, le prix de quinze mois de formation s'élève à 8.100 euros pour les salariés qui financent eux-mêmes leur master et à 13.300 euros pour les autres.


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