L'intuition, un complément indispensable aux décisions rationnelles

Sites

Manageris (accès gratuit à cinq synthèses)   Acheter "Intuition at work"   Acheter "Intuition, its powers and perils"

Dans le monde des affaires, on considère généralement qu'une bonne décision est une décision fondée sur une analyse rigoureuse et méthodique de la situation. Ce faisant, on oublie facilement que la plupart des décisions font appel à une appréciation subjective, y compris lorsque l'on croit qu'elles reposent sur des bases rationnelles : une part de jugement intervient au moment de définir les critères de choix, de pondérer ces critères, de noter chaque option selon ces critères, etc. Ainsi, quelle que soit la rigueur de votre raisonnement, la qualité de vos décisions dépend fortement de la pertinence de votre jugement.

Les deux livres analysés mettent en valeur les mérites de l'intuition dans le cadre d'une utilisation raisonnée. Il s'agit en effet d'un mécanisme parfois beaucoup plus puissant que l'analyse rationnelle, mais dont la fiabilité est aléatoire. L'intuition peut donc rarement supplanter l'analyse rationnelle, mais elle peut la compléter utilement à condition d'en connaître les limites.

1. Un mécanisme puissant, différent de l'analyse rationnelle
Gary Klein, chercheur et consultant, a étudié le mécanisme de décision intuitif chez des professionnels amenés à décider dans l'urgence - militaires, pompiers, médecins, etc. Il montre qu'ils utilisent un processus inconscient de raisonnement par analogie : ils assimilent de façon quasi instantanée la situation rencontrée à une situation déjà connue, afin de trouver la réaction la plus appropriée. C'est ainsi qu'un grand maître d'échecs peut jouer 50 parties simultanément, car il est capable de décider presque spontanément d'un mouvement pertinent. Ce faisant, il n'utilise aucun processus poussé d'analyse, mais assimile immédiatement la configuration du jeu à l'une des milliers de configurations types qu'il a en mémoire. Et cela, inconsciemment.

Le mécanisme de l'intuition   Perception intuitive de la situation Celle-ci tient compte des perceptions non conscientes (ex : expression du visage de l'interlocuteur) et des ressentis émotionnels Assimilation à une situation répertoriée en mémoire Le cerveau fait inconsciemment appel aux données enfouies en mémoire, et rapproche la situation observée d'un cas de figure connu Impulsion à agir selon les indications de sa mémoire Dictée inconsciemment par la mémoire, cette impulsion prend la forme d'une conviction soudaine, d'un malaise, etc.

Les jugements intuitifs cumulent de nombreux bénéfices :

Ils sont beaucoup plus rapides que les raisonnements analytiques : ils ne prennent souvent qu'une fraction de seconde. C'est pourquoi les Marines américains forment désormais leurs officiers à s'appuyer sur leur intuition en situation de combat.

Ils tirent parti des savoirs inconscients, en plus des connaissances conscientes : ils reposent donc sur une richesse d'information bien plus grande. Par exemple, si vous doutez de l'intérêt de lancer un produit malgré des analyses marketing prometteuses, c'est peut-être que vous avez perçu divers indices qui cadrent mal avec les résultats de cette étude.

Ils surpassent le raisonnement lorsqu'il s'agit d'interpréter nos émotions, car traduire celles-ci en raisonnement conscient est difficile et souvent trompeur. Ainsi, avant de prendre un nouveau poste, mieux vaut se fier à son sentiment général qu'à une analyse méthodique des pour et des contre.

2. L'intuition peut rarement supplanter complètement l'analyse rationnelle
La puissance du mécanisme intuitif le rend extrêmement séduisant. En réalité, le risque d'illusion est grand, car les failles de ce processus sont nombreuses :

Avant tout, l'intuition n'est fiable que s'il est possible d'assimiler sans erreur la situation rencontrée à une situation déjà vécue, ce qui suppose une forte expérience du sujet. C'est la différence entre une intuition fondée et une impulsion naïve à l'action.

Vos motivations inavouées risquent d'influencer vos décisions à votre insu, car le processus intuitif prend aussi en compte les émotions inconscientes.

Votre perception de la situation peut être biaisée. Par exemple, on accorde souvent une importance excessive aux informations les plus récentes ou les plus frappantes. Ainsi, votre intuition peut vous conduire à rejeter un projet pourtant solide parce que vous venez de vivre un échec cuisant.

Ainsi, le recours à l'intuition est facilement trompeur. Il faut donc apprendre à tirer parti de l'intuition sans être piégé par ses limites.

3. L'intuition peut compléter utilement l'analyse rationnelle
Il est généralement préférable de fonder ses décisions sur une analyse rationnelle, nourrie par les enseignements de son intuition. Voici quelques conseils pour conjuguer au mieux intuition et analyse :

Veillez à n'utiliser votre intuition que sur les domaines où vous avez une expérience : son efficacité vient de la pertinence des scénarios que vous avez en mémoire et auxquels vous assimilerez les nouvelles situations rencontrées.

Interrogez votre intuition avant de vous engager dans un raisonnement analytique, et gardez-en une trace écrite : une fois que vous aurez commencé à décomposer le problème, vous risquez de perdre de vue votre jugement intuitif.

Sites

Manageris (accès gratuit à cinq synthèses)   Acheter "Intuition at work"   Acheter "Intuition, its powers and perils"

Arrêtez la démarche analytique au stade d'une liste d'avantages et d'inconvénients, puis faites appel à votre jugement pour décider à partir de cette vue d'ensemble. En effet, calculer un score agrégé pour noter chaque option masque le raisonnement et ne permet plus d'exercer son intuition.

Accordez du crédit à votre intuition lorsqu'elle contredit le résultat de l'analyse rationnelle : cela peut être le signe que vous avez négligé certains paramètres importants.